vendredi 22 novembre 2013

Que sont devenus les romans des cycles 2012 ?

2012 fut une année fertile pour les cycles, puisque nous dénombrons pas moins de dix auteurs ayant obtenu l'estampille pour ce cru ! Dix auteurs car, au-delà du roman en lui-même, c'est bien l'auteur qui progresse durant un cycle.

Pour chacun, le parcours est unique. Souvent, il s'agit d'un premier roman. Mais on trouve également des auteurs plus expérimentés, voire, déjà publiés. Le fait de travailler un texte en profondeur avec des bêta-lecteurs est toujours une expérience inoubliable.

Ainsi, Ayaquina nous dit :

"Ce qui est fondamental pour moi, c'est l'idée que le cycle a été un travail de réflexion qui a changé de telle façon mon regard sur l'écriture que j'ai d'autres attentes maintenant en ce qui concerne mon écriture. Quand j'écris maintenant, je sens que je n'ai pas du tout les mêmes freins,que j'ose m'attaquer à des choses qui me semblaient infranchissables."
Pour Patastec :
"Le cycle m'a permis de travailler en équipe, d'apprendre à m'ouvrir aux autres et à accepter de les écouter. (…) Ma pensée s'est structurée. J'ai compris toute l'importance de la trame, du plan, des recherches. (…) Dans mon écriture, il y a l'avant et l'après cycle."

Durant le cycle, chaque auteur dispose d'un fil de discussion qu'il peut gérer comme il veut, avec ses bêta-lecteurs bien sûr, mais également avec les autres membres du collectif, qui viennent volontiers encourager l'équipe !

Tout le monde n'a pas le même temps ou la même énergie à investir dans un texte, que ce soit côté bêta-lecteurs ou côté auteur. Pour cette raison, certains cycles vont s'étirer sur près de deux ans quand d'autres ne prennent que quelques mois. La durée moyenne s'établit approximativement autour d'un an. Ce qui ne signifie pas que l'auteur ne fait rien durant cette période ! En effet, durant les phases où les bêta-lecteurs lisent et décortiquent le texte, il est très fréquent qu'il travaille sur d'autres projets. Un bon entraînement pour l'attente des retours éditoriaux.

Justement, qu'en est-il de ces fameux retours ? Son cycle achevé, l'auteur est encore soutenu et conseillé pour l'aider à cibler ses envois aux éditeurs. Le partage d'expérience sur les lignes éditoriales et le conditions d'envoi s'avère souvent précieux.

En 2012, on peut noter en particulier un temps relativement faible entre les envois et l'acceptation du roman pour publication (quinze jours pour le record). En effet, pas moins de sept romans ont déjà trouvé leur maison d'édition. Pour des raisons de confidentialité, nous ne pouvons pas tous révéler dans ce billet, mais nous tiendrons les fidèles lecteurs de ce blog informés des bonnes nouvelles ! Ce que nous pouvons dire à ce jour :

*Mary's Blues, de Macalys, sera publié en numérique chez Harlequin HQN en début d'année 2014.

*L'étrange cas du docteur Ravna et de Monsieur Gray, de GabrielleTrompeLaMort est sorti aux éditions Voy'el (papier) à la mi-octobre 2013, et sortira ultérieurement en numérique chez Bragelonne.

*Les Reflets d'Earanë, de Khellendros, sortira en 2014 aux éditions Asgard.

* Kaefra, Cité de la terre et du ciel, d'Elikya, sortira en 2014 aux éditions Asgard.

*Kisasi, de Chapardeuse, sortira chez Griffe d'Encre en septembre 2015.

* La couleur de l'aube, d'Aelys, sortira aux éditions l'Armada en 2014.

* La vieille paire de lunettes, de Scipion, se trouve dans les tuyaux éditoriaux.

D'autres ont souhaité retravailler leurs textes après les premiers retours éditoriaux.
C'est le cas pour :

*Contre-Mesures, de Desienne.
*La brume des ténèbres, de Patastec.

En parallèle de ces nouvelles moutures, les auteurs travaillent sur d'autres projets d'écriture, forts de l'expérience acquise en cycle.

Pour tous, l'aventure continue !

Merci à Kira pour la rédaction de cet article !

mardi 19 novembre 2013

Un cycle pour faire le deuil d'un premier roman

Il existe tout un imaginaire autour du cycle CoCyclics (qui permet à un auteur de travailler son roman en étant accompagné de bêta-lecteurs, puisqu'il se passe dans un espace réservé à ces seuls bêta-lecteurs). Il est perçu parfois comme trop carré ou trop cadrant et quand on ne le vit pas de l'intérieur, ce n'est pas évident de comprendre comment cela fonctionne exactement.


Ce que nous avons envie de vous dire aujourd'hui, c'est que derrière ce cadre mystérieux (il y a des règles mises en place pour cadrer le cycle, protéger les auteurs, soutenir les bêta-lecteurs et vice-versa), ce dont nous sommes témoins à l'intérieur de CoCyclics, c'est de la profonde humanité qui y existe.

A l'intérieur du forum, à l'abri des regards, les discussions et les questions animent, opposent ou rassemblent les membres. Tous n'ont pas la même vision du cycle, tous ne voient pas l'accompagnement d'un auteur de la même façon, tous ne vivent pas l'écriture ou la bêta-lecture de la même manière. On est loin, très loin, du bloc monolithique que certains pourraient imaginer. Même la finalité du cycle n'est pas vécue de la même manière.

Aucun des romans sortis de cycle ne se ressemble, aucun des auteurs passés en cycle ne se ressemble. Mais tous vivent un projet humain, peu importe ce que devient le roman au terme de cette aventure : publié ? Pas publié ? En attente de publication ? Ou déposé dans un tiroir avec plus ou moins de sérénité ?

Ayaquina est arrivée au bout du cycle avec son premier roman, "Les Gens de l'eau". Elle nous livre ici un témoignage sur ce que le cycle lui apporté et sur le deuil qu'elle a fait de ce premier roman, après tant d'années à travailler dessus. Un deuil après avoir enduré toutes les phases du cycle ? Mais alors, à quoi bon ?

La réponse est dans ces lignes : 
 
 "Je vais commencer par vous dire que lorsque je suis arrivée sur CoCyclics j'avais encore des doutes non pas sur ma capacité à écrire des histoires, mais à écrire un français potable. Ayant deux nationalités et étant née au Portugal (je suis arrivée en France quand j'avais 23 ans) et ayant fait la moitié de mes études en français (jusqu'en troisième puis jusqu'à la fac en portugais) j'écrivais encore un français plein de lusitanismes ou de gallicismes. Aujourd'hui, je mesure combien j'ai évolué et combien je me sens 1000 fois plus à l'aise lorsque je me promène dans la langue française que le jour où j'ai poussé la porte de CoCyclics.
 
Puis est venu le moment où j’ai voulu travailler sur « les Gens de l'eau », mon premier roman, écris pour ma fille qui venait de naître et qui portait en lui une sorte de message jeté à l'eau pour le jour où je ne serais plus là, mais que ma fille pourrait encore me lire. 
Je l'ai soumis pour un cycle. Et là, j'ai été refusée, orientée en têtard*. Bien sûr, j'ai été très déçue, j'avais l'impression que ça remettait en cause ma capacité à devenir écrivain, que ce texte que j'avais cru essentiel pouvait ne pas être compris par d'autres, jugé intéressant ou assez abouti pour mériter même un passage en cycle.
 
J'ai découvert alors, qu'écrire c'était bien plus qu'écrire, c'était prendre en compte une réalité, un public, un public qui n'est pas ma fille, ou alors qui devait absolument transcender cette relation pour pouvoir toucher d'autres personnes. J'ai appris aussi qu'un message trop intime prenait le risque de ne pas toucher les gens qui ne faisaient pas partie de cette intimité.

Après avoir compris que ce refus ne présumait pas de mes qualités dans l'absolu, pas plus qu'il ne déterminait l'avenir de ce roman, j'ai été heureuse de travailler en têtard. J'ai eu la place de comprendre ce qu'était la structure et la force d'un texte : le rythme, l'efficacité de l'intrigue, la visualisation, la caractérisation des personnages, la crédibilité de leurs objectifs, etc.
 
J'ai eu la place pour expérimenter beaucoup de choses, affiner mon style, etc. Puis à la fin, j'ai re-postulé en cycle. J'ai été acceptée. Le travail s'est poursuivi, toujours plus à fond, toujours plus près de ce que je n'aurais jamais osé imaginer faire un jour. Je mesurais l'écart entre ce qui un jour m'avait semblé un bon roman, et tout ce qui me restait encore à apprendre pour qu'il puisse en devenir un.
 
Avant ce travail, je fuyais les scènes d'action, me croyant incapable d'en écrire une qui scotche le lecteur. Mes bêtas m’ont obligé à m’y confronter. Je fuyais les émotions parce que je trouvais ça trop larmoyant, mes bêtas m’ont obligé à les affronter et à trouver mon propre ton. Mes décors étaient vides, je n’aime pas ça les descriptions, mes bêtas ne m’ont pas laissé me vautrer dans la facilité et me détourner du problème. J'ai dû lire, chercher sur internet, chez d’autres auteurs, expérimenter mille fois pour trouver comment dépasser mes limites et être à la hauteur de ce que je voulais transmettre au lecteur, le captiver !

Pendant le cycle, ma mère était malade, et encore une fois, j’ai cédé aux sirènes de l’intimité. Comme je corrigeais beaucoup avec elle (elle adorait les histoires et elle était très bonne en français) je me suis mise inconsciemment à écrire pour elle et elle est devenue mon public. J'écrivais ce qui pouvait la distraire de sa maladie. Mon roman a pris une autre tournure, mais toujours aussi intime. Pourtant, je me suis surpassée techniquement, et je suis sûre que de ce point de vue, il n’a rien à voir.
 
D’ailleurs, j'arrive aujourd'hui à écrire des choses que je n'aurais jamais crues possibles grâce à ce travail. Mais à la fin de mon cycle, j'étais obligée de reconnaitre que les Gens de l'eau est ce genre de roman qui peine à trouver son public. Quelques mois après la fin de mon cycle, j'ai relu mon roman et j'ai décidé de le réécrire une fois encore. Entre la têtard, le cycle, et toutes mes adresses imaginaires (ma mère et ma fille), mon roman me semblait être une sorte patchwork dans lequel je ne me reconnaissait plus et il fallait que je reprenne le projet à zéro pour retrouver son âme.
 
Je savais que maintenant j'avais les moyens de le réecrire autrement. J'aurais dû me dire à ce moment là, qu'il fallait peut-être que je le laisse un peu de côté, le temps que ça refroidisse dans ma tête, mais ce roman me hantait. Il m'empêchait d'aimer mes autres romans, qui pourtant me semblaient bien meilleurs que celui-là. Les Gens de l’eau était comme un premier amour, absolu, plein de cet idéal que l'on attribue aux premières fois.
 
J'ai donc commencé la réécriture. Puis à un moment donné, j'ai calé. Ce roman m'ennuyait, au point où j'avais l'impression d'avoir perdu gout à l'écriture. J'y avais peut-être passé trop de temps, je connaissais l'histoire par cœur, je ne partais plus à l'inconnu. Et puis un miracle s'est produit, j'ai fini un autre roman que j'avais en cours et je me suis mise à l'aimer. Non plus de cet amour aveugle que j'avais eu pour « Les gens de l’eau », mais comme un texte qui a ses qualités et ses défauts. Et puis je me suis remise à avoir envie d'écrire, parce que je sentais que désormais j'en avais les moyens. Je me suis mise à aimer plus le fait d'écrire que le roman en soi.

Vous vous dites peut-être, mais alors le cycle n’a servi à rien ??? 

Tout d’abord, je précise que c’est mon expérience, elle est unique et ne concernera peut-être personne d'autre. Certains ont édité après un cycle, d’autres ont abandonné avant la fin, etc. Mais même si « les Gens de l’eau » ne venait jamais à être édité (pour l’instant, tout est possible, je laisse l’avenir me guider) je dirais que ce cycle a été in-dis-pen-sable ! Il m'a servi à faire le deuil de ce roman, un roman qui m'empêchait d'écrire et m'enfermait dans une sorte d'idéal stérile. J'ai aujourd'hui bien plus qu'un produit fini à envoyer aux éditeurs, j'ai la capacité d'en écrire d’autres, de continuer à m'améliorer sans avoir peur que ce ne soit pas parfait, sans avoir peur de recevoir la critique, parce que désormais, j'ai un regard distancé sur mes textes, parce qu'ils ne sont pas moi, ils n'expriment qu'une partie de moi perfectible et déclinable sous plein d'autres formes et romans. 
C’est l’histoire de la poule aux œufs d’or, mais à l’envers, j'ai peut-être perdu l’œuf, mais j'ai gagné la poule ! C’est bien mieux, non ?"


Merci à Ayaquina pour ce témoignage. 

* Pour plus d'informations sur la bêta-lecture têtard, rendez-vous sur cet article : "La bêta-lecture têtard, qu'est-ce que c'est ?"

vendredi 15 novembre 2013

Le blog 100% francophone de Cécile Duquenne

Hello, Guten Tag, Hej,

Non, Tintamar(r)e n’est pas devenu polyglotte, puisque au contraire, nous posons nos valises aux portes de SFFF 100% VF. Un blog tenu par Cécile Duquenne qui est aussi à l'initiative des "Nuits de l'écriture" dont nous vous avions parlé dans un précédent article. Un membre de l'équipe Tintama(r)re lui a posé quelques questions : 


Bonjour Cécile, merci d’avoir accepté de nous faire visiter ton blog où tu chroniques des livres écrits par des auteurs francophones.

Merci à vous de m'accueillir ici à nouveau ^_^

http://sffffrancophone.blogspot.be/

Comment s'organise le blog? J’ai remarqué que certains jours de la semaine ont un sujet dédié, comme par exemple le tag « c’est lundi », peux-tu nous en dire plus ?

Le blog n'a pas vraiment d'organisation figée : ça se fait surtout au fil de mes humeurs, de mes lectures... quand j'ai quelque chose à y dire, je poste une entrée, sinon, eh bien... je me tais. ;-) Il n'y a que le "C'est Lundi, que lisez-vous ?" qui a son jour dédié, parce que c'est un rendez-vous d'une partie de la blogosphère littéraire et que je m'y tiens. Sinon, j'avoue, je n'ai pas d'organisation particulière. Notamment parce que j'ai remarqué que pas mal de blogs s'enferment dans une structure qui devient parfois tellement pesante pour son blogueur qu'il finit par s'en dégoûter et/ou perdre le goût de lire... or, je refuse de laisser ça m'arriver ! :)

Combien de livres lis-tu en moyenne par mois ?


Une dizaine, cela dit je ne peux pas parler de tout sur le blog. Une bonne moitié sont francophones mais, pour le reste, non. Il y a de l'anglo-saxon, de l'américain... et beaucoup de japonais, études obligent ! Sinon, je lis aussi pas mal d'essais sur la traduction, l'interculturalité, etc. Mais je n'en parle pas sur le blog, tandis que je profite de mes rendez-vous du "C'est lundi, que lisez-vous ?" pour évoquer mes lectures de fictions non francophones.

L'opinion courante voudrait que le vivier francophone soit très restreint, as-tu déjà eu l'impression d'en avoir fait le tour ?

Restreint ? Restreint ??
Cela fait dix ans que je lis des romans francophones, bientôt deux ans que j'ai un blog sur le sujet, et plus le temps passe, plus j'ai l'impression que ce domaine est vaste !
Il faut savoir que la SFFF francophone d'aujourd'hui n'est plus du tout la même qu'il y a dix ans. Nouveaux éditeurs, nouveaux auteurs, nouveaux supports... c'est en renouvellement constant ! Et en inflation constante. Sincèrement, c'est un milieu aussi vaste que dynamique, avec de multiples voix différentes, des plumes très variées. Depuis dix ans, on a l'émergence d'une voix littéraire française originale, à la fois unique et multiple. Et pour preuve : nous sommes de plus en plus traduits et appréciés à l'étranger pour cela ! Alors non, ce n'est pas un vivier, et encore moins restreint (à la fois en termes de nombre d'auteurs et de variation des genres et des contenus).

Et c'est ce que je voulais montrer avec mon blog : que le milieu de la SFFF francophone est vaste et que, oui, on peut facilement y dédier son blog - voire une bonne moitié de son temps de lecture, et même bien plus ;)

As-tu noté des tendances particulières aux auteurs francophones ? Des sujets davantage abordés ?

Oui et non.
Oui car il y a clairement des effets de mode : en ce moment, en France, c'est la bit-lit, le zombie, bref, l'urban fantasy. Il y en a beaucoup (trop ?), notamment chez les petits éditeurs qui surfent sur la vague (et on les comprend). Il y a du bon et du mauvais dans cette mode.

Non car, comme je l'ai dit plus haut, la SFFF francophone a l'incroyable capacité de se renouveler constamment, de ne jamais se satisfaire de ce qu'elle a, de la simple mode. Selon moi, la spécificité française, elle est là. :)

En commentaire au tout premier article posté lors de la création du blog, en mars 2012, tu t’engageais à écrire environ deux chroniques par semaine. Plus d’un an et demi après, pari tenu ?

Non ! Tout simplement parce que si je devais publier deux chroniques par semaine, je ne lirais plus du tout de littérature étrangère. Ni d'essais. Or, je tiens à conserver l'éclectisme, la liberté de lire (ou non !) du francophone quand je veux comme je veux.

En plus de lire quotidiennement pour entretenir ce blog, tu es l'auteure des Nécrophiles Anonymes dont le tome deux publié aux éditions voy'[el] est dès à présent en précommande. En consultant ma boule de cristal, j'ai appris tu avais d'autres projets d'écriture sur le feu, et que tu modères aussi les nuits de l’écriture… Admets-le, tu as un double !

Non mais je bois beaucoup de thé (c'est la boisson des Super-Héros ;)). Et surtout, pour certaines raisons personnelles, j'ai la conscience aiguë qu'on n'a qu'une vie pour tout faire. Alors je lis, j'écris, je ne m'arrête jamais... d'une part parce que je déteste l'inactivité et, d'autre part, parce que j'ai plein d'envie et que je suis comme Antigone : je veux tout, et tout de suite. Alors je fais tout, et tout de suite. Ou du moins quand j'en ai envie.




Parce que je ne m'impose rien. Le mot d'ordre, chez moi, est "plaisir". C'est ma quête du bonheur personnel. Et tous les jours, je trouve le bonheur dans ce que je fais. Un éternel recommencement :)

Merci d'avoir accepté de répondre à nos questions, Cécile, et au plaisir de lire ta prochaine chronique.

Merci à vous... et à la prochaine alors !

samedi 9 novembre 2013

Le nénuphar « réservé aux plus de 18 ans »

Un nouvel espace s'ouvre sur le forum de CoCyclics pour permettre aux auteurs de travailler des textes érotiques ou des textes contenant des scènes violentes, d'habitude interdites sur le forum. Cet espace est réservé aux auteurs majeurs et l'accès y est restreint. 

C'est Paul Beorn*, l'un des administrateurs du forum, qui est à l'initiative de ce projet  : 

Tintamar(r)e : CoCyclics ouvre une section de bêta-lecture et de discussion pour des scènes érotiques ou violentes, pourrais-tu nous en dire plus ? Pourquoi ? Comment ?

Beorn : Parler de sexe en écriture ou poster une scène olé olé quand tout le web vous regarde, c'est parfois un peu gênant. Seulement voilà : ces scènes-là sont difficiles à écrire. Les auteurs se demandent souvent : est-ce que j’en fais trop ? Ou pas assez ? Y a-t-il des « méthodes » pour mieux réussir ? Ou au contraire, des trucs à éviter à tout prix ? (tss, arrêtez de ricaner bêtement au fond de la classe : je parle d’écriture…). La violence, c’est un peu différent mais… pas tellement en fait. Il faut la doser, on se demande si on atteint son objectif, si on est clair, si on y va trop fort, ou pas assez.
Alors, les administrateurs ont créé… Le nénuphar rose et noir ! Un espace de travail réservé aux plus de 18 ans où l’on peut parler sans tabou, poster les textes avec des scènes érotiques ou violentes qu’on n’ose pas montrer ailleurs, et en discuter entre inscrits.

Tintamar(r)e : Tu veux dire qu’avant, on n’avait pas le droit de parler de sexe sur la mare ? C’était encore le XIXème siècle, chez vous, c’est ça ?

Beorn : Si, si, quand même, on avait le droit d’en parler. Mais c’est délicat. Certaines parties du forum sont cachées, mais d'autres sont visibles du web. Nous avons aussi quelques mineurs parmi nous et cela pose un problème légal. Et puis, il y a les tabous qu’on se met soi-même dans la tête. Je pense qu’avec un espace à accès plus restreint, spécialement consacré à cela, il sera plus facile d’oser en parler.

Tintamar(r)e : Quel intérêt pour les auteurs de travailler des scènes érotiques ou violentes ? On ne pourrait pas s'en passer ?

Beorn : Ces scènes, on les trouve dans des romans qui sont lus par des millions de gens, elles font partie de la littérature. Alors pourquoi ne pourrait-on pas les travailler sur CoCyclics ? Après tout, c’est un forum dédié à l’échange de bêta-lectures et aux discussions sur l’écriture. Le but est toujours le même : c’est d’aider les auteurs, débutants ou non, à s’améliorer.

Tintamare : Alors pourquoi interdire cet espace aux moins de 18 ans ? Après tout, les ados voient du porno sur internet et ils écrivent des fanfics de fesses sur Harry Potter...

Beorn : C’est peut-être dommage de bloquer cet espace aux ados « avertis ». Mais la loi, c’est la loi. Et comme aucun juriste ne sait exactement comment l’interpréter, on ne peut pas mettre le forum en péril.

Tintamare : Comment est né ce projet ? L’un des administrateurs a dit « j’ai une idée ! » et c’était parti ?

Beorn : C’est exactement ça. Le problème existait depuis le début, on était obligés de bloquer les textes érotiques et je trouvais ça vraiment dommage. Alors un jour j’ai dit : « eh, les copains, si on faisait un espace rien que pour ces textes ? » Là tous les autres administrateurs m’ont répondu : « super, bonne idée, Beorn ! » Et juste après : « Bon, alors tu t'en occupes ? »

Tintamar(r)e: Pourquoi toi, Beorn ? Tu aimes ça, la violence ? Et le sexe ?

Beorn : Au contraire, j’ai parfois du mal à écrire des scènes érotiques à cause de tous les blocages que cela génère. Je me suis dit que d’autres inscrits étaient sûrement dans le même cas et qu’un tel espace pourrait nous aider. Voilà pour le « rose ».
L’idée de textes « noirs » est venue en discutant avec d’autres auteurs du collectif, qui étaient plus intéressés par cet aspect.

Tintamar(r)e: Bon alors, qu’est-ce qui est au programme : torture, meurtres, sexe explicite, bondage ?

Beorn : Pourquoi pas ? Tant qu’on respecte le règlement du forum et les lois en vigueur, vive la liberté ! Mais j’espère qu’il n'y aura pas que cela. Je voudrais y voir une grande diversité de textes et d’auteurs ! Et pour le rose, à titre personnel, j’aimerais aussi voir de la poésie, de la suggestion, de la tendresse, de la complicité, de l’amour.
Voilà, je fais mon coming out : je suis fleur bleue. Un peu. C’est grave, docteur ?


Attention, le "nénuphar rose et noir" ne sera ouvert à la bêta-lecture que du 15 novembre au 19 décembre 2013.

Mais si tout se passe bien, on le rouvrira à intervalles réguliers. Pour en savoir plus, poser des questions ou demander à s’inscrire : http://tremplinsdelimaginaire.com/cocyclics/phpBB3/viewtopic.php?f=5&t=213761


vendredi 8 novembre 2013

Secrets d'anthologistes : Jean-Pierre Fontana.

Crédit photo : Fabienne Rose
Difficile de présenter en peu de mots Jean-Pierre Fontana : écrivain (La geste du Halaguen, Shéol, La femme truquée, La Jaune, Quand pleure le crépuscule etc. ainsi qu’une série de romans en collaboration avec Alain Paris au Fleuve Noir), nouvelliste (une anthologie intitulée Souvenirs de Demain est parue en 2012 chez Armada) anthologiste (Demain l'Italie... - Éd. Opta ; Le livre d’Or de la science-fiction italienne - Pocket, plus deux recueils de nouvelles de Robert F. Young chez NéO : Le pays d'esprit & Le Léviathan de l'espace), fondateur du « Grand Prix de la Science-fiction française » en 1974 devenu depuis le « Grand Prix de l’Imaginaire » qu’il préside, directeur de revue depuis le mythique Mercury (1965-1968), organisateur du premier « Congrès de la Science-Fiction Française » à Clermont-Ferrand en 1974 (évènement qui devint la Convention Française de SF et de fantasy qui existe toujours aujourd’hui) et de nombreux Festivals (1972, 1976, 1977, 1988), il codirige avec Jean-Pierre Andrevon la revue Lunatique, qui parait désormais deux fois par an sous l’égide de Galaxies. Ajoutons à cela ses activités de critique dans diverses revues, de préfacier (Les Formiciens de Raymond de Rienzi, Tschaï de Jack Vance, avec son ami Jacques Chambon, entre autres), de chroniqueur et rédacteur pour « l’Écran Fantastique » et on aura une petite idée de la carrure du monsieur (1). Infatigable promoteur et défenseur de l'Imaginaire, cinéphile érudit (il vient de participer à la rédaction du monumental et très attendu Cent ans et plus de cinéma fantastique et de science-fiction de Jean-Pierre Andrevon - aux éditions Rouge Profond), il a eu la gentillesse de bousculer son agenda pour répondre aux questions de notre envoyée spéciale, Mariedelabas (MDLB).


MDLB : Comment es-tu arrivé à diriger des anthologies plutôt que de te consacrer à 100 % à ton œuvre personnelle ?
JPF : D’abord, les deux choses sont passionnantes. Quand tu écris, c’est que tu as quelque chose à dire, à évacuer. Mais je suis aussi un lecteur depuis mon plus jeune âge. Alors, quand il t’arrive, tout à coup, comme une bénédiction, la possibilité d’éditer un certain nombre d’auteurs, et donc de lire des textes qui vont te plaire, c’est une chance. Je l’ai eue très jeune car, au retour du service militaire, très rapidement, j'ai commencé à écrire des nouvelles dans des fanzines, et j’ai créé mon propre fanzine qui s’appelait Mercury . À l'époque, j’ai eu la chance d’avoir quelques auteurs connus qui ont accepté de publier dans les pages de Mercury (NDLR Michel Demuth, Jacques Chambon, Pierre Versins, Maurice Limat, Nathalie Henneberg... entre autres), et j'ai eu également deux collaborateurs qui m’ont permis d’évoluer moi-même. Également, j’ai eu l’occasion d’avoir des contacts avec un certain nombre d’auteurs italiens. Au travers d’une revue, j’ai effectué un premier travail d’anthologiste en quelque sorte.
Puisqu'on parle d’anthologie, j’ai réalisé deux numéros de Mercury en hommage à Jean-Louis Bouquet, et c’était bien un travail d’anthologiste puisque j’effectuai un choix parmi ses œuvres.
Par la suite, compte tenu de ces expériences et du fait que j’avais des correspondants italiens, Michel Demuth, qui était un des rédacteurs en chef des éditions Opta m’a demandé de réaliser un numéro spécial de Fiction consacré à la science-fiction italienne. Cela avait déjà été fait auparavant par Roland Stragliati, et j’ai donc travaillé sur une deuxième anthologie d’auteurs italiens avec Lino Aldani qui m’a aidé dans la sélection des textes. J’ai traduit la plupart des textes avec la collaboration de quelques autres personnes.
Quelque temps après, Jacques Goimard qui dirigeait la collection des « Livres d’Or de la science-fiction » m’a demandé d’en réaliser un pour la SF italienne, qu’on a appelé d’ailleurs « l’Opéra de l’Apocalypse ». Et là aussi, j’ai de nouveau effectué un travail d’anthologiste, toujours avec l’aide de Lino Aldani avec qui lequel j'avais noué de véritables relations amicales et parce que je n’avais pas la possibilité de disposer de tous les textes parus en Italie. Donc il a réalisé une présélection et moi ensuite j’ai fait un choix.
J’ai eu encore d’autres sollicitations suite à mes propositions, en particulier aux Nouvelles Éditions Oswald où j’ai réalisé deux anthologies de nouvelles de Robert Young. Ces anthologies ont été établies avec des textes déjà publiés, mais sur 20 ou 30 ans, donc c’était intéressant de les organiser et à chaque fois j’ai rajouté une nouvelle inédite que Robert Young m’avait envoyée.
Finalement, je me suis retrouvé un beau jour à m’occuper d’une revue qui s’appelle Lunatique, qui est devenue maintenant Lunatique/Galaxies. Le travail de rédacteur de revue n’est pas tout à fait un travail d’anthologiste, mais il y a un choix de textes à effectuer et une certaine disposition à leur donner.
Dans ce cadre particulier, nous allons prochainement publier un numéro spécial qui est une anthologie de nouvelles italiennes. Et nous allons continuer dans ce sens-là, pour nous concentrer soit sur des auteurs soit sur des pays. Par contre, je n’ai pas eu l’occasion de consacrer un numéro à un thème particulier. Mais, dans le fond, quand on publie une revue, on essaie quand même d’avoir une certaine ligne directrice.

MDLB : Ta motivation pour diriger des anthologies, c'est donc ton "plaisir de lecteur" ?
JPF : Bien sûr, et un plaisir de découverte. Dans des anthologies, tu as deux cas de figure : soit tu découvres des textes que tu ne connais pas, soit tu choisis parmi un certain nombre de textes ceux qui te plaisent le plus ou ceux qui correspondent le mieux à ce que tu veux dire.
Cela a été le cas quand j’ai préparé mes anthologies sur Robert Young par exemple.

MDLB : Comment s’effectue le choix du thème ? Pour l’Italie, tu es d’origine italienne, tu traduis cette langue, donc c’était naturel ?
JPF : Oui, depuis le début des années soixante je suis en contact avec des auteurs italiens. J’en ai invité en France. Je ne lis pas tout ce qui parait, mais j’essaie au moins de me tenir au courant. Avoir des correspondants là-bas facilite les choses. Et je dois dire que j’adore la science-fiction italienne, elle est complètement différente de la science-fiction française. Cela n’a rien à voir, elle est beaucoup plus régionaliste. Un écrivain qui habite à Bologne, un qui habite en Sicile ou un qui habite à Rome ou à Venise écrit des choses très différentes. Je prends un exemple avec Renato Pestriniero, qui habite Venise : presque toutes ses histoires se passent à Venise. J’avais publié un texte d’un auteur de Rome dont la nouvelle s’appelait « Le dernier pape ». Dans cette histoire, la chrétienté n’existait quasiment plus, mais par contre, exactement comme les journées du Patrimoine, les gens allaient visiter le Vatican, et on surveillait ce que faisait le pape à travers de petites lucarnes. Cela s’appelait le peep pope show. C’était assez extraordinaire… Mais il n’y a qu’un Italien qui pouvait penser à ça !
Je me souviens d’une nouvelle d'Aldani, qui lui vivait du côté de la Lombardie. Il faisait allusion dans ce texte, que j’avais traduit sous le titre Bigaré de Rouge, à une république qui pendant la guerre (alors qu'historiquement il y avait eu la république des fascistes) avait été fondée par les résistants. Les écrivains italiens, souvent, immergent leur histoire dans leur terroir. Dans le prochain numéro de Lunatique qui va être consacré à la SF italienne, il y aura deux nouvelles qui sont de ce genre : une de Renato Pestriniero qui se passe dans une Venise complètement polluée et une de Valerio Evangelisti où, dans un régime totalement contrôlé par les mafias, elles se livrent à des combats entre elles. Lui habite à Bologne où il s’est passé pas mal de choses. Donc on ne trouve quasiment pas en SF française ce caractère régionaliste et c’est ce qui me plait en SF italienne.

MDLB : Après, sur le choix du sujet, par exemple pour Robert Young…tu éprouvais un intérêt pour l’auteur...
Aah, pour Robert Young (Robert Franklin Young, NDLR), j’ai adoré ce qu’il écrivait, j’ai eu des larmes aux yeux avec « Petit chien perdu », et puis tu as des textes comme «L’ascension de l’arbre », « La déesse de granit » qui sont absolument extraordinaires, ou « Le pays d’esprit ». C’était quand même un auteur qui a eu 80 ou 90 nouvelles publiées dans Fiction ou Galaxie, un des auteurs phare de l’époque. En plus, ce qui est assez extraordinaire, c’est que même son exécuteur testamentaire ne connaissait pas sa profession. J’ai lu un jour dans une introduction ou une préface, qu’il croyait qu’il était concierge dans un lycée. Alors c’est possible qu’il l’ait été à la retraite puisqu’il habitait du côté des Grands Lacs. Mais moi, j’ai des correspondances avec Robert Young dans lesquelles il m’explique bien qu’il est ingénieur dans une fonderie ou une aciérie. Donc en Amérique finalement ils ne le connaissent pas, il était un peu à l’écart du milieu de la SF américaine. Cela dit, il a publié dans Astounding, dans Analog ou Galaxy mais aussi dans des journaux ou revues qui n’avaient rien à voir avec la SF.

MDLB : étonnant, car de nos jours on a l'impression qu’un auteur américain commence par avoir du succès dans son pays, puis on le traduit très vite et on le vend chez nous...
JPF : Pour lui ça n’a pas marché comme ça. Du reste il n'a pratiquement pas écrit de romans, ou très peu. Par exemple, La quête de la Sainte Grille, qui a été publiée chez Opta, n'a jamais été publiée aux États-Unis. C'est pour ça que je voudrais arriver à publier l’intégrale de son œuvre. Par exemple, la seule nouvelle inédite que j’ai publiée car j’ai pu me la procurer par Robert Soubie, et dont le titre original est «The Dandelion Girl» (NDLR : « La fille aux cheveux d'or », disponible dans Lunatique 78/79 chez EONS) est une des deux ou trois plus belles nouvelles que je connaisse sur les paradoxes temporels, une histoire d'amour magnifique.

MDLB : Comment fait-on le choix des textes, et celui de l'ordre du sommaire ?
JPF : Déjà, on prend celles qui plaisent… Les nouvelles peuvent avoir des défauts, qu’on peut toujours corriger, mais c'est une question de coup de cœur, particulièrement pour les nouveaux auteurs. Dans le fond, je reçois des textes, j'en lis plusieurs, ceux qui me plaisent (on est au moins deux à lire), sont mis de côté pour les publier dans un numéro à venir. Quelquefois on prévoit pour un numéro précis, mais on peut avoir un problème de place, et dans ce cas on le repousse au numéro suivant.
Il faut aussi donner un rythme, on ne va pas sélectionner deux nouvelles qui sont d'un thème ou d’un style un peu voisin ; on va tâcher de donner une certaine alternance. Le choix des textes tient compte de ces différents éléments.
Pour l'ordre : à la limite, aucune anthologie ne peut se faire de la même manière. Dans certaines anthologies on va mettre en premier un coup de poing, de façon à donner tout de suite envie au lecteur d'aller plus loin. Ensuite, c'est comme une espèce de courbe. À quel moment va-t-on placer le point d'orgue, au goût de l'anthologiste évidemment ? Au début, au milieu ou à la fin ? C’est totalement différent d’une anthologie à une autre.
Pour le spécial Italie qu'on va sortir, c'est plus Pierre-Jean Brouillaud qui m'a fait l'essentiel des traductions et c'est lui qui en a organisé l'ordre, sous ma direction. Nous avons prévu une espèce de montée en puissance, avec une ou deux grosses surprises quand on arrive à la fin. Nous avons essayé d'éviter d'avoir deux coups de poing à la suite, il faut aussi laisser des respirations. C'est un peu comme une partition musicale. Après, c'est ce que l'anthologiste ressent... Le lecteur, je ne sais pas ! Et puis il y a des lecteurs qui ne lisent pas dans l’ordre, que ce soit en fonction du titre ou d'une autre raison. Quelquefois certains commencent par la fin, cela m’arrive à moi aussi de ne pas lire dans l'ordre !
J'ai lu dernièrement un recueil de nouvelles, celui de Nina Allan (NDLR Complications chez Tristram). À part la première qui est presque hors sujet, ensuite on retrouve des personnages et un thème commun à propos des horloges avec une montée en crescendo et la conclusion.
C'est à l'anthologiste ou à l'auteur, s'il est son propre anthologiste, de l'organiser. Par exemple quand j'ai fait mon recueil, je l'ai organisé selon des thèmes.
Dans une revue, ce n'est pas tout à fait pareil. Dans Lunatique, on essaie de ne pas mettre les nouvelles dans n’importe quel ordre. Par exemple dans Fiction, ils passaient la science-fiction en premier et ils mettaient le fantastique à part.

Anecdote particulière :
En 1978, en partant en Italie où je devais rencontrer à Rome, pour L'Écran Fantastique, Luigi Cozzi qui allait sortir son film Starcrash, j'ai fait une halte à San Cipriano, proche de Pavie, pour un petit bonjour à mon ami Lino. Il habitait à quelques pas du Pô où, autrefois, il possédait une de ses barques de pêcheurs comportant une sorte de cabane pour, éventuellement, y passer la nuit. Suite au naufrage de cette embarcation vieillissante, il avait pu récupérer l'abri de planche et l'avait installé dans son jardin. Depuis, c'était dans ce cabanon qu'il se retirait pour trouver l'inspiration et écrire. On n'imagine pas toujours comment et où les écrivains travaillent. J'avais été très touché qu'il me conduise dans son « sanctuaire ».


(1) : Il a même enseigné les littératures fantastique et de science-fiction dans le cadre des Métiers du Livre à l'IUT de Clermont-Ferrand durant une dizaine d'année.
Pour aller plus loin :>
La page de wikipédia sur Jean-Pierre Fontana.
Le site officiel de Jean-Pierre Fontana.



Merci à Mariedelabas pour la rédaction de cet article !

Note : nous ne savons pas qui a pris ce beau portrait de Jean-Pierre Fontana mais si le photographe se reconnait, qu'il n'hésite pas à nous envoyer un message (cocyclics@gmail.com) pour que nous puissions le créditer !

dimanche 3 novembre 2013

Les Gardiens de la République, de Mathias Moucha

Mathias Moucha, alias Scipion sur le forum de CoCyclics, a terminé en septembre son cycle consacré à son roman « Les Gardiens de la République ». Mandragore, de l'équipe Tintamar(r)e a eu l'occasion de l'interviewer.

Tintamar(r)e : Pourrais-tu commencer par nous présenter ton roman, « Les Gardiens de la République » en quelques mots ?

Scipion : Il s’agit du premier tome d’une trilogie intitulée « La Guerre des deux Lunes ». En voici le pitch : « Deux frères. Syllion, mage très puissant, domine la République tyrénienne. Elryn, fine lame, en est l'une des étoiles montantes. Dans les hautes sphères du pouvoir, au Sénat, dans les vieilles cités soumises de Jugarta et d'Atharsès, jusqu'aux ruelles de Tyrène, une conspiration mortelle se trame dans l'ombre. Lequel parviendra à sauver la République ? ».

J’ai passé du temps dessus, autant vous le livrer tel quel plutôt que de tenter quelques paraphrases maladroites ! Pour le dire en d’autres mots, il s’agit de l’affrontement de deux frères qui tentent chacun à leur manière de sauver la République. L’un dans la légalité, l’autre en dehors. Mais la légalité, est-ce le « Bien » ? Et l’illégalité le « Mal » ? Le Bien et le Mal ne se confondent-ils pas ? Bien sûr, il y a des batailles, des poursuites, du suspense, des complots, de la politique tantôt feutrée, tantôt musclée, un peu d’humour et bien entendu… de l’amour.

T : Comment t'est venue l'idée de placer ton histoire dans un monde antique ?

S : Par simple goût. D’une part, il se trouve que je suis très intéressé par l’Histoire, un amoureux de l’Antiquité et de la politique de type parlementaire. J’ai lu de nombreux livres sur Rome, la Grèce, mais aussi sur la Révolution française. D’autre part, je n’étais pas très motivé pour situer cette histoire dans un monde médiéval classique, avec rois, seigneurs, etc. Un tyran m’attire moins qu’une assemblée qui se déchire !

Et puis, au-delà de l’aspect aventures, cette trilogie est à mes yeux une tragédie. Un cadre d’inspiration antique s’y prêtait donc bien. 

T : Ce cycle a été particulièrement rapide (de mars à septembre), surtout tes phases III & IV (de juillet à septembre), est-ce parce que tu as eu peu de corrections à effectuer ou parce que tu as pu travailler efficacement ?

S : Les deux en fait. J’ai énormément travaillé ce roman avant de le soumettre en cycle, il était déjà assez abouti. Bien sûr, mes alphas Fred et Sycophante, ainsi que mes bétas Earane et Iluinar ont pointé tout plein de choses, toujours avec délicatesse bien sûr, mais il n’y avait rien de vraiment problématique. Je tiens une nouvelle fois à les remercier pour leur temps, leur excellent travail et leur rapidité.

T : D'après ce que j'ai pu comprendre, cette histoire te suit depuis longtemps. Pourrais-tu nous en dire un peu plus ?

S : J’ai commencé cette histoire… au siècle dernier ! En 1995. « La Quête de Lumière », la toute première version des Gardiens était assez mauvaise, euh… très mauvaise même. Contrairement à beaucoup de mes petits camarades, je n’ai pas été un grand lecteur dans mon enfance et je n’ai jamais souhaité devenir écrivain. 

C’était le cinéma qui m’intéressait. J’ai d’ailleurs fait une école de caméraman/monteur et ai travaillé plusieurs années comme technicien. Mais en réalité, c’était le scénario et la réalisation qui me passionnaient. Une nouvelle version de « La Quête de Lumière » et quatre ans plus tard, j’ai été sélectionné pour le master-class « Equinoxe » organisé par Canal+ et Columbia Tri-Star, mais cela n’a rien donné de concret. Après quelques années d’écriture de scénarios, et pas assez de succès hélas, j’ai cessé d’écrire pour trouver un travail stable et gagner ma vie correctement. Mais bien entendu, l’écriture m’a rattrapé.

Un matin, je me suis levé en me disant : « tiens, tu as quelques scénarios pas complètement mauvais sur ton disque dur, pourquoi ne pas essayer d’en faire des romans ? Rien que pour toi, et un jour pour ton fils ? » J’ai donc commencé à écrire, non plus dans l’optique d’un film, mais dans celle d’un livre. Deux ou trois ans plus tard, j’ai découvert CoCyclics.

En même temps que j’ai réalisé que mon style était navrant, que mes intrigues et mes personnages n’étaient pas assez creusés, j ai découvert la puissance de la littérature par rapport au scénario. Cela a été une révélation. Dans un roman, pas de budget, pas de producteur, personne d’autre que l’écrivain pour s’occuper du jeu d’acteur, de la lumière, des décors, du rythme, du moindre détail… La combinaison des vingt-six lettres, des dix chiffres et des quelques signes de ponctuation est infinie, mais pour chaque histoire, une seule est la bonne, vraiment la bonne ; et tout le jeu consiste à essayer de la trouver, cette juste combinaison, au moins de s’en approcher. Un autre avantage, non négligeable, c’est que si le texte n’est pas publié, au moins il existe comme produit fini. Ce qui n’est pas le cas avec le scénario, qui ne constitue qu’une étape, un projet.

J’ai encore mis quatre ans à terminer les Gardiens, écrivant entre-temps plusieurs nouvelles et un roman fantastique intitulé « Seuls », qui sortira à ma grande fierté en 2014 chez les éditions Bragelonne.

T : C'est le deuxième cycle que tu termines. Se sont-ils passés de la même manière ? Ta précédente expérience t'a-t-elle aidé pour ce cycle ?

S : La nuit et le jour ! Mon premier cycle sur « Seuls » a duré très longtemps, un an à deux jours près. L’alpha-lecture a été assez violente. Pas dans le sens où mes alphas ont été violents avec moi, non, mais ils m’ont pointé de gros problèmes de fond. Et ils étaient nombreux… J’ai beaucoup travaillé sur la phase II, en fait j’ai réécrit environ deux tiers du roman, qui a gonflé de 50% d’ailleurs. La bêta-lecture a été ensuite plus calme. Ce cycle m’a appris énormément, au-delà de « Seuls », et j’ai pu mettre à profit tout ce travail sur les Gardiens. D’où un cycle beaucoup plus léger.

T : Ce roman est le premier volume d'une série, pourrais-tu nous dire quelques mots sur la suite ?

S : Hum, difficile d’en parler sans trop en dévoiler. Ce que je peux dire, c’est que si les Gardiens est relativement sombre, les deux tomes suivants le seront encore davantage. Le tome II verra l’apparition de nouveaux personnages et sera très différent du premier. Il est en cours de rédaction. Quant au tome III… ah non, désolé, je ne lâcherai rien. Je peux juste dire que j’ai hâte de l’écrire !

Merci beaucoup et très longue vie aux Gardiens de la République !

Merci à vous et très longue vie à CoCyclics ! Un miracle dans ma vie, cette rencontre.

Note : merci à Mandragore pour la rédaction de cet article !