dimanche 24 juin 2012

Face à l'éditeur, partie 1


Pour un auteur, avoir mis un point final à ses corrections n’est souvent que le début d’un long périple ! Le périple de l’édition, un moment riche en émotion et en stress : son texte, qu’il a chouchouté pendant si longtemps, va partir et arriver sur le bureau d’un éditeur. Celui-ci le lira, le jugera et peut-être lui donnera la chance d’arriver sur les rayonnages des librairies !

Plusieurs choix s’offrent alors à l’auteur : le plus classique, envoyer son bébé par e-mail ou par la poste, mais aussi le tête à tête !

Le speed-dating ou tête à tête :
Depuis quelques années, un speed-dating est organisé à l’occasion des Imaginales. Mais de quoi s’agit-il ? Le principe est simple : on parle de son roman durant dix minutes devant un éditeur. Le but est d’apprendre à présenter son manuscrit et de recevoir des conseils précieux. Pour Kira, une grenouille qui a participé au speed-dating de 2011, c’est le « plaisir de parler avec des éditeurs que je n’aurais pas forcément eu l’occasion de croiser autrement. Pour le reste, je présentais un manuscrit jeunesse alors qu’il n’y avait que des éditeurs adultes, c’était donc essentiellement pour le plaisir de la rencontre et quelques conseils d’ordre général. »
Cependant, cela aboutit assez rarement à une publication. Kira explique : « N’y allez pas en vous disant que vous allez vous faire éditer. Les éditeurs sont là pour vous offrir des conseils, pas pour trouver un manuscrit. Du coup, ça vous met tout de suite moins la pression. N’hésitez pas à poser des questions, à expliquer votre démarche d’écriture. Vous êtes là pour apprendre. » Puis, elle ajoute : « Cela m’a permis d’avoir un retour détaillé de la part d’une directrice de collection sur mon manuscrit, que je n’aurais sans doute pas eu sans cela (puisque j’étais hors cible éditoriale). »

De son côté, Conteuse conseille vivement d’apporter un pitch, une présentation de l’auteur et les trois premiers chapitres pour les laisser aux éditeurs intéressés. « J’ai pu constater que c’était un geste apprécié ! »
Puis, elle évoque les résultats du speed-dating de l’année dernière pour elle. Le premier éditeur lui a surtout posé des questions : « Écrivez-vous en suivant un style ? Quels auteurs aimez-vous ? Regardez-vous la fantasy d’aujourd’hui ? Stephane Marsan a jeté un coup d’œil sur la première page du manuscrit, et a qualifié le texte en quelques mots. » De cette rencontre, elle a tiré plusieurs réflexions : « il faut penser à la façon de se présenter, l’enthousiasme ne suffit pas. Mémoriser les noms des auteurs d’un certain nombre de livres peut être utile. De plus, l’auteur doit vérifier que le style du roman convienne à l’éditeur. Par exemple, si celui-ci s’adresse à des amateurs d’action, de combats, ne pas lui proposer du descriptif. »
Le deuxième éditeur qu’elle a rencontré lui a surtout fait des remarques et lui a donné des conseils qui l’ont parfois surprise. « Il s’était préparé des dossiers pour chaque participant. Certains manuscrits étaient annotés. Il avait amené des livres publiés pour montrer ce qu’il faisait : chapeau pour sa préparation ! Il a complimenté le travail fait par CoCyclics (qu’il apprécie) et il m’a encouragé à poursuivre mes recherches et à insister pour trouver un éditeur. Il m’a même conseillé de ne pas me limiter aux éditeurs de SFFF. » De cette rencontre, elle a tiré « des conseils tous azimuts et un aperçu de la façon dont travaille un éditeur en recherche d’auteurs. ». Elle confie que c’est toujours agréable de « rencontrer quelqu’un qui a apprécié ce qu’on écrit, même si ce n’est pas dans sa ligne éditoriale. »
Le troisième éditeur lui a posé principalement des questions et lui a donné quelques informations : « Classez-vous votre texte dans la fantasy ou le fantastique ? Pourquoi ? N’avez-vous jamais envisagé de le présenter comme un roman type historique ? Bilan de la rencontre : un nombre de signes important est un handicap pour un premier roman. Autour de 500 000 sec est un compromis convenable. »
Pour Conteuse, ce furent des « échanges riches » et au final « un contact beaucoup plus facile à la troisième rencontre. Et beaucoup d’interrogations nouvelles. Il faut ensuite laisser décanter un peu. »

Renouveler, l’expérience du speed-dating, est-ce une bonne idée ? Nadia Coste, qui a animé l’évènement, répond : « Même si le speed-dating connecte auteurs et éditeurs, je ne suis pas convaincue qu’il y ait un intérêt à en faire plusieurs. Au contraire, un candidat de cette année, qui venait pour la seconde fois avec le même roman, a plutôt entendu des commentaires du genre "ce que je vous ai dit l’année dernière est toujours valable. Si personne ne vous a dit oui depuis, laissez tomber ce roman", et c’est quand même plus dur à encaisser que "celui-là ne colle pas à notre ligne, mais vous écrivez-bien, alors peut-être le prochain... voici ma carte". Et ne pas attendre le speed-dating de l’année suivante pour mettre à profit ce contact.
Les éditeurs ne sont pas là pour chercher des manuscrits : ils sont là pour donner des conseils aux jeunes auteurs. C’est aussi pour faire prendre conscience aux auteurs que les éditeurs sont des êtres humains et qu’on peut leur parler simplement de nos projets quand on les croise. »

La prise de contact à distance :
Cependant, plus souvent la première prise de contact se fait à distance, par l’envoi du manuscrit par la poste et de plus en plus souvent par e-mail. Thomas John, qui a publié La Cité Noire aux éditions Asgard, raconte : « Mon éditeur venait de se créer, je ne le connaissais pas encore et donc j’avais envoyé mon manuscrit à plusieurs éditeurs avant (Bragelonne, Mnémos, l’Atalante, Pré aux Clercs, Mille Saisons, etc.) Après de longues attentes, on m’a informé que Asgard recherchait des manuscrits de fantasy et que je m’inscrivais dans leur ligne éditoriale. Après avoir reçu mon roman, Thomas Riquet m’a indiqué que le comité de lecture allait se pencher dessus et que j’aurai une réponse sous 2-3 mois. Thomas a lu mon manuscrit dans la nuit et Asgard m’a envoyé une proposition dans les 24 heures. »

Nadia Coste, auteur des Fedeylins, publié chez Gründ, explique : « J’avais envoyé le manuscrit à une dizaine d’éditeurs, il y a quelques années, avant de connaître CoCyclics. Après les premiers refus type, j’ai cherché à améliorer le roman (et c’est là que j’ai plongé dans la mare). Une fois mon cycle terminé, j’ai mieux ciblé mes envois pour une nouvelle vague de soumission… mais je n’ai pas eu le temps de recevoir des réponses, cette fois-ci ! Eh oui, mon éditeur actuel, qui lançait une collection de romans chez Gründ, cherchait des manuscrits d’auteurs francophones. Il a entendu parler des Fedeylins par bouche à oreilles, est allé lire le premier chapitre sur mon blog… et m’a demandé le manuscrit complet. Trois ou quatre jours après, il m’appelait, emballé par l’histoire et l’univers, pour me demander d’envoyer les tomes suivants (qui étaient déjà écrits). À partir de là, il y a eu un mois d’appels réguliers, de discussions, de réflexions… jusqu’au « oui » final. »


Ermina et l'équipe tintamar(r)e

4 commentaires :

  1. Merci pour ces retours intéressants, grâce à vous j'en sais un peu plus sur ces fameux "speed datings" !

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  2. Le speed-dating est vraiment une expérience intéressante. Chouette article et merci pour ces témoignages.

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  3. Je ne connaissais pas du tout ces speed-datings, c'est une initiative intéressante ! Merci pour l'article.

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  4. Encore une fois, un article très intéressant ! Vite la suite !

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